Le Chat dans la Litterature et la Poésie: Part 2

Publié le 3 Février 2012

Bonsoir a tous!

Ce soir la suite d'une des chroniques de notre Soania, sur la Littérature et les chats....

QUIZ Les-chats-dans-la-litterature 4780


"Les chats offrent aux écrivains quelque chose que les humains ne savent pas offrir : une compagnie qui n'est ni revendicative, ni dérangeante, et qui est aussi apaisante et changeante qu'une mer très calme."
Patricia Highsmith

ECRIVAINS ETRANGERS

c

L'écrivain, poète, romancier, et nouvelliste américain EDGAR ALLAN POE (1809-1849) a utilisé le chat noir, annonciateur de mauvais présages dans l'univers fantastique, dans une célèbre nouvelle intitulée tout simplement "Le chat noir", publiée en 1843. Le narrateur, un homme qui avait toujours aimé les animaux, se met à haïr un chat dès lors que son épouse s'attache à l'animal. Son obsession pour le chat devient malsaine et le pousse à torturer et à tuer le félin et à assassiner sa femme. Il sera puni...grâce au chat.

 cc

CHARLES DICKENS (1812-1870) fut un grand amateur de chats. Il fit figurer de nombreux félins dans ses livres et en possédat plusieurs. Sa fille Mary "Mamie" Dickens raconte plusieurs anecdotes relatant la relation entre son père et les chats.

Extrait de "Mon père tel que je m'en souviens" :

"Je me souviens du jour où [Williamine] nous présenta ses chatons. Elle sélectionna un coin du bureau de mon père pour les y installer, puis les apporta un par un, depuis la cuisine, et les déposa dans le coin choisi." Dickens fit déplacer les chats mais la chatte ramena ses petits à nouveau un par un dans le bureau. A la troisième tentative, "au lieu de mettre les chatons dans un coin de la pièce, elle les plaça aux pieds de mon père, puis s'installa et lui lança un regard si implorant qu'il ne put résister et les autorisa à rester."

Un des chatons de Williamine fut baptisé "le chat du maître" car il se tenait toujours auprès du romancier quand celui-ci travaillait. Un soir, alors que Dickens écrivait à son bureau en compagnie de son chat, la bougie s'éteignit. "Mon père ralluma la bougie,caressa le chat qui le regardait avec un air pathétique, et poursuivit sa lecture. Quelques minutes plus tard, alors que la lumière semblait baisser, il leva les yeux juste pour voir le chat éteindre délibérément la chandelle d'un coup de patte, avant de lui lancer un regard implorant... et le chat reçut les caresses qu'il désirait tant."

Parmi les "Histoires comme ça", RUDYARD KIPLING (1865-1936) raconte celle du "chat qui s'en va tout seul". Le chien et le cheval se laissent domestiquer contre de la nourriture. Le chat se montre plus rusé.

 ccc

L'un des plus grands dramaturges américains, TENNESSEE WILLIAMS, met en scène des personnages fragiles, souffrant de solitude, et victimes d'un système social impitoyable. Il écrit sur l'incompréhension, la frustration, la culpabilité, sur l'homosexualité et les névroses, faisant de ses personnages des martyrs expiant toutes les contradictions sociales. Dans sa nouvelle "Malédiction", parue dans "Le boxeur manchot", Tennessee Williams conte le destin tragique de Lucio, un ouvrier qui perd son travail à l'usine, qui est congédié par sa logeuse, et dont la chatte Nitchevo disparaît. Lucio la retrouve blessée à mort. Il ne veut pas lui survivre.

 

Nombre de ses pièces ont été adaptées au cinéma, dont "La chatte sur un toit brûlant" [Cat On a Hot Tin Roof] (1958), avec Paul Newman et Elizabeth Taylor.

Dans un autre genre, PATRICIA HIGHSMITH (1921-1995), romancière américaine auteur de romans policiers tirant parfois sur le fantastique, célèbre le chat dans un recueil de nouvelles paru en 2005, "Des chats et des hommes". Voilà le félin personnage de fiction, inspirateur de poème, sujet d'étude, modèle d'artiste.

 d

Patricia HIGHSMITH vouait une passion débordante aux chats, préférant leur compagnie à celle des humains pour pouvoir écrire sans être dérangée. Elle note dans "Des chats et des hommes""Un chat fait qu'une maison est un foyer. Un écrivain n'est jamais seul avec un chat, tout en étant suffisamment seul pour pouvoir travailler. Qui plus est, qu'il déambule ou qu'il dorme, un chat est une oeuvre d'art vivante, en perpétuelle métamorphose."

Un autre recueil de 10 nouvelles est paru en 1981 : "La proie du chat". Dans le premier texte, un chat introduit le mystère et l'horreur dans une paisible réunion amicale.

 

 ddd

LE CHAT DANS LA LITERATURE ET LA POESIE

 

"Hautain, libre, mystérieux, voluptueux, babylonien, impersonnel, il est l'éternel compagnon de la supériorité et de l'art - incarnation de la beauté parfaite et frère de la poésie - le chat doucereux, grave, savant et patricien."
H.P. Lovecraft (1890-1937)

LE CHAT ET LES POETES

Nombreux sont les poètes qui ont écrit sur les chats. Je n'ai retenu ici que les poèmes qui me plaisent particulièrement.

Le plus célèbre poète ayant les félins comme source d'inspiration reste sans doute CHARLES BAUDELAIRE (1821-1867). Dans "Les fleurs du mal", il écrit plusieurs textes à leur propos.

 a-copie-1.jpg

LES CHATS
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres;
L'Èrèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.

Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin;

Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
Ètoilent vaguement leurs prunelles mystiques.

LE CHAT
Dans ma cervelle se promène,
Ainsi qu'en son appartement,
Un beau chat, fort, doux et charmant.
Quand il miaule, on l'entend à peine,

Tant son timbre est tendre et discret;
Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
Elle est toujours riche et profonde.
C'est là son charme et son secret.

Cette voix, qui perle et qui filtre
Dans mon fonds le plus ténébreux,
Me remplit comme un vers nombreux
Et me réjouit comme un philtre.

Elle endort les plus cruels maux
Et contient toutes les extases;
Pour dire les plus longues phrases,
Elle n'a plus besoin de mots.
Non, il n'est pas d'archet qui morde
Sur mon coeur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,

Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu'harmonieux !

"Le chat", section I, Les fleurs du mal.

De sa fourrure blonde et brune
Sort un parfum si doux, qu'un soir
J'en fus embaumé, pour l'avoir
Caressée une fois, rien qu'une.

C'est l'esprit familier du lieu ;
Il juge, il préside, il inspire
Toutes choses dans son empire ;
Peut-être est-il fée, est-il dieu ?

Quand mes yeux, vers ce chat que j'aime
Tirés comme par un aimant,
Se retournent docilement
Et que je regarde en moi-même,

Je vois avec étonnement
Le feu de ses prunelles pâles,
Clairs fanaux, vivantes opales,
Qui me contemplent fixement.

"Le chat", section II, Les fleurs du mal.

CHARLES CROS (1842-1888), poète et inventeur, parla lui aussi du chat dans son oeuvre poètique, qui tient, pour l'essentiel, en deux recueils : "Le coffret de santal" (1873) et "Le collier à griffes" (publié en 1908, soit 20 ans après sa mort).

 aa-copie-1.jpg

A UNE CHATTE
Chatte blanche, chatte sans tache,
Je te demande, dans ces vers,
Quel secret dort dans tes yeux verts,
Quel sarcasme sous ta moustache.

Tu nous lorgnes, pensant tout bas
Que nos fronts pâles, que nos lèvres
Déteintes en de folles fièvres,
Que nos yeux creux ne valent pas

Ton museau que ton nez termine,
Rose comme un bouton de sein,
Tes oreilles dont le dessin
Couronne fièrement ta mine.

Pourquoi cette sérénité?
Aurais-tu la clé des problèmes
Qui nous font, frissonnant et blèmes,
Passer le printemps et l'été?

Devant la mort qui nous menace,
Chats et gens, ton flair, plus subtil
Que notre savoir, te dit-il
Où va la beauté qui s'efface,

Où va la pensée, où s'en vont
Les défuntes splendeurs charnelles? ...
Chatte, détourne tes prunelles;
J'y trouve trop de noir au fond.

Le coffret de santal

PAUL ELUARD (1895-1952), pilier du surréalisme, a aussi sa vision du chat :

 aaa-copie-1.jpg

CHAT
Pour ne poser qu'un doigt dessus
Le chat est bien trop grosse bête.
Sa queue rejoint sa tête,
Il tourne dans ce cercle
Et se répond à la caresse.

Mais, la nuit l'homme voit ses yeux
dont la pâleur est le seul don.
Ils sont trop gros pour qu'il les cache
Et trop lourds pour le vent perdu du rêve.

Quand le chat danse
C'est pour isoler sa prison
Et quand il pense
C'est jusqu'aux murs de ses yeux.

Le chat fait également partie de l'univers de JACQUES PREVERT (1900-1977) :

LE CHAT ET L'OISEAU
Un village écoute désolé
Le chant d’un oiseau blessé
C'est le seul oiseau du village
Et c’est le seul chat du village
Qui l'a à moitié dévoré
Et l'oiseau cesse de chanter
Le chat cesse de ronronner
Et de se lécher le museau
Et le village fait à l'oiseau
De merveilleuses funérailles
Et le chat qui est invité
Marche derrière le petit cercueil de paille
Où l’oiseau mort est allongé
Porté par une petite fille
Qui n’arrête pas de pleurer
Si j’avais su que cela te fasse tant de peine
Lui dit le chat
Je l’aurais mangé tout entier
Et puis je t’aurais raconté
Que je l’avais vu s'envoler
S'envoler jusqu’au bout du monde
Là-bas où c'est tellement loin
Que jamais on n'en revient
Tu aurais eu moins de chagrin
Simplement de la tristesse et des regrets

Il ne faut jamais faire les choses à moitié.

Histoires et d'autres histoires.

Le poète et écrivain belge MAURICE CARÊME (1899-1978) célèbre le chat à sa façon :

 b-copie-1

LE CHAT ET LE SOLEIL
Le chat ouvrit les yeux
le soleil y entra
le chat ferma les yeux
le soleil y resta

voila pourquoi le soir
quand le chat se réveille
j'aperçois dans le noir
deux morceaux de soleil

L'Arlequin

SOIR DE DECEMBRE
Ce soir de décembre
Est si triste
Qu'on ose à peine respirer.
On entend doucement le disque
De la pleine lune tourner.

Et sous l'aiguille de la bise
Meurt et renaît, le long des toits,
Une longue plainte que brise
Le miaulement bref d'un chat.

La grange bleue

JOSE LUIS BORGES (1899-1986), écrivain, poète et essayiste argentin, a parfaitement saisi ce qui anime un humain qui aime un chat :

 bb-copie-1

A UN CHAT
Non moins furtif que l'aube aventurière,
Non moins silencieux que le miroir,
Tu passes et je pense apercevoir
Sous la lune équivoque une panthère.
Par quelque obscur et souverain décret
Nous te cherchons. Nous voulons, fauve étrange
Plus lointain qu'un couchant ou que le Gange,
Forcer ta solitude et ton secret.
Ton dos veut bien prolonger ma caresse;
Il est écrit dans ton éternité
Que s'accordent à ta frileuse paresse
Ma main et son amour inquiété,
Ton temps échappe à la mesure humaine.
Clos comme un rêve est ton domaine.

Le poète chilien PABLO NERUDA (1904-1973) a signé une magnifique ode à notre félin préféré (bien que connu pour préférer les chiens!) :

 bbb-copie-1.jpg

ODE AU CHAT
Au commencement
les animaux furent imparfaits
longs de queue,
et tristes de tête.

Peu à peu ils évoluèrent
se firent paysage
s’attribuèrent mille choses,
grains de beauté, grâce, vol...
Le chat
seul le chat
quand il apparut
était complet, orgueilleux.
parfaitement fini dès la naissance
marchant seul
et sachant ce qu’il voulait.

L’homme se rêve poisson ou oiseau
le serpent voudrait avoir des ailes
le chien est un lion sans orientation
l’ingénieur désire être poète
la mouche étudie pour devenir hirondelle
le poète médite comment imiter la mouche
mais le chat
lui
ne veut qu’être chat
tout chat est chat
de la moustache à la queue
du frémissement à la souris vivante
du fond de la nuit à ses yeux d’or.

Il n’y a pas d’unité
comme lui
ni lune ni fleur dans sa texture:
il est une chose en soi
comme le soleil ou la topaze
et la ligne élastique de son contour
ferme et subtil
est comme la ligne de proue d’un navire.
Ses yeux jaunes
laissent une fente
où jeter la monnaie de la nuit.

Ô petit empereur
sans univers
conquistador sans patrie
minuscule tigre de salon,
nuptial sultan du ciel
des tuiles érotiques
tu réclames le vent de l’amour 
dans l’intempérie
quand tu passes
tu poses quatre pieds délicats
sur le sol
reniflant
te méfiant de tout ce qui est terrestre
car tout est immonde
pour le pied immaculé du chat.

Oh fauve altier de la maison,
arrogant vestige de la nuit
paresseux, gymnaste, étranger
chat
profondissime chat
police secrète de la maison
insigne d’un velours disparu
évidemment
il n’y a aucune énigme
en toi:
peut-être que tu n’es pas mystérieux du tout
qu’on te connaît bien
et que tu appartiens à la caste la moins mystérieuse
peut-être qu’on se croit
maîtres, propriétaires,
oncles de chats,
compagnons, collègues
disciples ou ami
de son chat.

Moi non.
Je ne souscris pas.
Je ne connais pas le chat.
Je sais tout de la vie et de son archipel
la mer et la ville incalculable
la botanique
la luxure des gynécées
le plus et le moins des mathématiques
le monde englouti des volcans
l’écorce irréelle du crocodile
la bonté ignorée du pompier
l’atavisme bleu du sacerdoce
mais je ne peux déchiffrer un chat.

Ma raison glisse sur son indifférence
ses yeux sont en chiffres d’or.

Source : internet



Rédigé par Eurothai - Sonia

Publié dans #Préambule

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :